Le surfeur de nuages
La Conception
Pour cette dernière image d’une série de quatre, je voulais retranscrire la fluidité d’un skieur de freeride dessinant une énorme trace en forme de « cinq » dans une combe raide entre deux pans de rochers. Ce premier croquis est le point de départ de la quête de l’image parfaite.

Plusieurs semaines plus tard, l’hiver touchait déjà à sa fin et je n’avais toujours pas trouvé la façon de poser ce cinq. Les tas de neige restant pour dessiner la combe parfaite disparaissaient à vue d’œil et j’allais me retrouver sans terrain de jeu pour passer à l’acte.

La réalisation
Un beau jour de printemps, tout s’est éclairci. Je devais recréer la scène de toute pièce et oublier la neige naturelle. J’avais déjà les troncs pour les sommets. Il ne me restait « que » à construire cette combe et l’habiller des flocons artificiels !
Après avoir essayé quelques idées plus saugrenues les unes que les autres pour modeler des dépressions en entassant de la sciure, la certitude de devoir bâtir le panorama « en dur » s’est installée.
J’avais toujours un énorme doute sur le fait de pouvoir utiliser des particules de bois pour la trace. Arriver à imiter les projections de neige avec des cristaux bien trop gros en espérant qu’ils adhèrent à la sous-couche semblait une gageure.
Pour cette « maquette », la taille comptait !
J’étais assez vite convaincu qu’il fallait utiliser du plâtre comme « couche de fond ».
Les strates ont été soigneusement disposées sur une armature préformée en haubans et treillis pour sculpter les pentes sur lesquelles le « cinq » se matérialiserait.


Il fallut très tôt valider les dimensions du chantier avec le format de l’image finale et la perspective souhaitée.
De même, je devais Imaginer l’angle de prise de vue idéal pour obtenir le rendu qui trottait encore dans ma tête.
Finalement, il restait encore à faire quelques essais pour choisir l’objectif adapté permettant de le réaliser.


C’est à cette étape déjà que l’éclairage devait être pensé pour recréer les ombre en fonction de la position de la caméra.
L’opération d’enneigement artificiel fut longue et fastidieuse.

Pour ce faire, une première couche de sciure a été collée sur le plâtre pour proposer un peu d’accroche à la future « poudreuse » composée de sciure fine et de poussière de craie pour la teinte.
Ce choix ne s’est pas imposé tout de suite. Il a fallu de multiples essais pour valider cette option.
C’est à ce moment que les premiers tests d’éclairage ont permis de « figer » la perspective.

Il restait la problématique du dessin de cette trace de façon la plus réaliste possible.
Tous les objets les plus insolites ont été utilisés pour essayer de tracer un cinq dans de la sciure .
Pour la coller à la sous-couche, j’ai tenté de l’humidifier ou de la mélanger avec de la colle.
En y intégrant de la farine et en la compactant, ce n’était pas mieux non plus.


La mise en scène
Le brouillard persistant dans ma tête m’a conduit à essayer toutes sortes d’idées pour atténuer un peu cette structure trop dure que la sciure amenait.
Le recours à des machines à brouillard commençait à former une ambiance qui me plaisait.

Ce n’était pas encore terrible, mais au moins, le noir et blanc amenait déjà un peu plus de profondeur à la scène.

Les prises de vue
C’est ici que les choses sérieuses commencent.
Quelques adaptations de dernières minutes ont encore été nécessaires pour trouver la bonne hauteur de la caméra.
C’est dans la pénombre du soir que les ombres parasites sont le mieux géreés.
Les éclairages s’allument, la fumées jaillit et la magie opère !


Le Surfeur de nuages
Finalement, en cherchant des formes intéressantes dans les nuages, je me suis convaincu que la trace dans de la ouate cotonneuse amènerait beaucoup plus de légèreté à l’image et lui ferait irrémédiablement prendre la hauteur qu’elle méritait !

«Le surfeur de nuages » raconte une quête :
« Toute la journée, nous avons cherché la trace à suivre pour franchir le dernier col. Elle devrait pourtant être évidente à repérer avec sa silhouette caractéristique décrite avec précision dans le guide des itinéraires de la région.
« À partir de la base de la tour ressemblant à une dent, se glisser sur le pied de ce “cinq” que forme le vallon. Après une courbe à gauche, s’élever en ascendance dans la même direction jusqu’à la barre de rochers supérieure puis au col sur la droite. »
Nous ne l’avons jamais trouvée, mais au fil de la montée, c’est un « cinq » en forme de trace laissée par un surfeur de nuages qui nous a conduits à bon port. »
