A l’Envers du plan, près de chez moi !
Il y a des matins d’hiver où le givre recouvrant les aiguilles de granit les habillent d’une parure étincelante, scintillante et immaculée. A la sortie du refuge du Requin, la sécheresse de ce froid envahissant les poumons d’une multitude de piqûres plus désagréables que douloureuses nous sort irrémédiablement de notre torpeur. Les lampes frontales illuminent l’humidité exhalée à chaque expiration par mes compagnons de cordées et forment un halo lumineux autour de leur tête.
La porte du refuge d’hiver refermée, c’est le silence qui prend le dessus. La magie de la lune qui a déjà entamé sa trajectoire d’échappement derrière l’aiguille des Grands-Charmoz n’arrive pas à supplanter cette sensation de vide amenée par l’absence totale de bruit. Enfin une pierre qui se détache d’une paroi au-dessus de nos têtes nous accorde à nouveau avec la partition sonore qui va suivre.
Les crampons sont vites attachés. Les skis, que nous utiliserons en face nord, sont fermement attachés sur le sac pour pas qu’ils forment une gêne dans l’ascension du col en versant est.
Les marches finement ciselées dans les pentes glacées par le premier de cordée défilent devant mon regard avec une régularité de métronome. Ma frontale rattrape la prochaine au-dessus de mes yeux alors que la dernière disparaît sous mes pieds happée par l’ombre d’une nuit qui n’a pas encore terminé de nous envelopper dans son atmosphère à la fois inquiétante et enveloppante.
Plus haut dans la pente, il faut prendre pied sur un sombre pilier rocheux. Le raclement des crampons sur le granit vient quelques peu rompre le mutisme dans lequel, la montagne et nous, avions plongé. Les quatre longueurs de corde sont avalées sans difficultés mis à part une balafre sur un bas de pantalon fait par un crampon ayant suivi une trajectoire par trop approximative.
L’arrête au-dessus de nous commence à s’illuminer au fur et à mesure que le soleil se découvre dans notre dos. Le but du jour est l’aiguille du plan et sa face nord qui domine Chamonix d’une chute de neige et de glace de plus de mille mètres.
Inscrire de parfaites courbes à ski dans cette écharpe d’une pureté quasi divine sera le sujet d’une prochaine aventure !
C’est magique à l’Envers du plan, près de chez moi !
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